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NAITREQUEFEMME
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9 janvier 2014

Le plus vieux détenus des États Unis

peltier2Leonard Peltier est un militant amérindien (Native American) anishinaabe/lakota, né le 12 septembre 1944, incarcéré depuis 1976 et condamné à deux peines à perpétuité. Il est membre de l'American Indian Movement.

L'organisation Amnesty International le considère comme un prisonnier politique, qui « devrait être libéré immédiatement et sans condition ».

« JE SUIS LA PREUVE VIVANTE DE LA VIOLATION DES DROITS DE L'HOMME... », par LEONARD PELTIER

[leonard peltier in jail] © bushka.cz

Symbole de toutes les résistances autochtones en Amérique du Nord, Leonard Peltier est emprisonné depuis 38 ans aux États-Unis pour un double meurtre qu'il n'a pas commis. Bien qu'étant considéré comme un «prisonnier politique» par de nombreux représentants de la Justice, militants, personnalités et organisations internationales, qui ne cessent de faire pression pour que son procès soit révisé, il n'a toujours pas obtenu satisfaction à ce jour.

Né à Grand Forks (Dakota du Nord) en 1944, ce membre des Premières Nations Sioux-Lakota, Anishinaabé

peltier1

et Chippewa, d'ascendance métisse canadienne-française, joua un rôle très actif dans les années 1970, au sein de l'American Indian Movement (AIM, Mouvement des Indiens américains), dans le réveil de la conscience autochtone et les revendications socio-économiques et culturelles des siens. Le 24 juin 1975, lors de la commémoration du massacre de Wounded Knee (1890) 1 , qui se déroulait à Pine Ridge (Dakota du Sud), deux faux Indiens à la solde du FBI s'infiltrèrent dans la réserve et deux agents fédéraux furent retrouvés assassinés.

Inculpé pour ces meurtres, Leonard Peltier fut jugé de manière expéditive à Fargo (Dakota du Nord), en 1977, et condamné à purger deux peines de prison à perpétuité, malgré une absence flagrante de preuves. Incarcéré tout d'abord au pénitencier de Leavenworth (Kansas), il croupit depuis l'année 2005 au centre de détention de Lewisburg (Pennsylvanie).

Dans son bouleversant témoignage, Écrits de prison. Le Combat d'un Indien (Éditions Albin-Michel, Paris, 2000), mêlant récits en prose, poèmes, prières, contes, souvenirs, symboles liés à sa culture, etc. - et dont je recommande vivement la lecture -, Leonard Peltier clame son innocence et dénonce la machination politico-policière dont il a été victime, son seul crime étant, à ses yeux, celui d'être «un Indien».

peltier9Les barreaux qui le séparent du monde n'ont jamais empêché cet héritier spirituel de Crazy Horse 2 et artiste-peintre d'être à l'écoute des grands bouleversements contemporains. Dans sa lettre annuelle, que j'ai traduite en français et reproduis ici, il nous met en garde contre la destruction qui guette la planète et les êtres humains, emportés par la spirale infernale du consumérisme et menacés par la montée de certains fanatismes. Plus que jamais, il exhorte les peuples autochtones à accomplir la mission sacrée que le Créateur leur a dévolue depuis des temps immémoriaux : celle de « gardiens de la Terre ».

Ismène Toussaint


 

 

DÉCLARATION DU JOUR DE DEUIL : « JE SUIS LA PREUVE VIVANTE DE LA VIOLATION DES DROITS DE L'HOMME... » par LEONARD PELTIER
(Traduit de l'anglais par Ismène Toussaint)

1er novembre 2013 - Salutations à vous, mes parents, mes amis et mes supporters,

peltier3Voilà encore une autre année. Il me semble qu'il s'en est écoulé des milliers, alors qu'il n'y en a en réalité qu'une seule, depuis la dernière fois que j'ai dicté l'une de ces déclarations pour le Jour du deuil. Aussi, je tiens à redire comme la dernière fois, que je suis honoré que vous vouliez bien entendre mes paroles.

Parfois, lorsque je m'étends sur mon banc pour un court laps de temps, entre éveil et sommeil, je suis libre et je suis avec vous. Je sais que cela peut paraître mélodramatique - pourtant, je n'essaie pas de l'être - mais les choses vous affectent différemment ici, à l'intérieur, et elles vous affectent différemment lorsque vous vieillissez. Mais je veux dire de toutes mes forces que les choses ne changent pas, du moins pour moi.

peltier7Quand je pense à tout ce que ce monde d'affaires nous a fait perdre, quand je pense aux pertes d'eau pure, de rivières et d'océans, quand je pense aux pertes d'air pur, quand je pense aux pertes de liberté pour ces familles travaillant durement qui, autrefois, avaient un père qui pouvait prendre soin d'elles avec un seul emploi mais qui, maintenant, doit en cumuler deux ou trois - et la mère aussi doit travailler, et les enfants qui doivent rentrer de l'école à la maison avec leur propre clé, et attendre le retour de l'un ou l'autre de leurs parents... Quand je pense à ces pertes, quand je pense aux esclaves à salaire qui sont créés journellement dans le monde entier au nom du progrès, quand je pense à ces pert es, je pense... zut, nous avons surement une bonne raison d'être en deuil, mais je crois réellement que le mot « deuil » devrait avoir une signification différente pour nous ; pas quelque chose qui nous fasse pleurer et lever nos mains au ciel en disant : « Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi moi ? Pourquoi nous ? Pourquoi ceci ? » mais quelque chose qui nous fasse dire : « PLUS JAMAIS ». Quelque chose qui nous fasse faire un vœu, renouveler nos efforts, renouveler nos esprits, renouveler nos directions pour reprendre notre eau, reprendre notre air, reprendre nos forêts et nos montagnes, et nos vallées, redonner à cette mère-terre l'équilibre naturel que le Créateur lui a destiné.

Il faut que nous parlions aux églises, que nous parlions aux différentes religions, il faut que nous leur

peltier5fassions reconnaître que la forme la plus forte du culte n'est pas de chanter des cantiques et de vous faire incliner la tête ; que la forme la plus forte du culte est de respecter, de restaurer et d'équilibrer la beauté de la nature et de la terre qui nous a été donnée, que celle-ci est une partie de nous, que nous en sommes une partie, et que nous en sommes responsables.

Ceci peut ressembler aux radotages d'un vieil homme de 69 ans, emprisonné depuis 38 ans, mais j'ai eu beaucoup de temps pour réfléchir à ces choses et quand mes petits-enfants viennent me rendre visite, cela me donne le sentiment de l'urgence qu'il y a, pour nous tous, de commencer à faire quelque chose MAINTENANT !

Si chacun de vous faisait le vœu d'entraîner six autres personnes à faire au moins UNE chose sensée pour restaurer cet équilibre et de mettre en réseau chacune d'entre elles, et d'en entraîner encore six, et de déployer ce maillage à partir de là comme les branches d'un arbre, alors, ensemble, nous pourrions faire la différence. Nous pouvons faire la différence en commençant aujourd'hui. Ce jour de deuil deviendrait le matin d'un nouveau jour !

J'ai cité d'autres personnes avant et je le fais donc à nouveau parce que je respecte la sagesse des anciens et des gens ayant un long passé. Quelqu'un, je ne me souviens plus qui, disait un jour ceci : « Il faut que tout le mal triomphe si les bonnes personnes ne font rien. » Si c'est plus que ce qui vous importe ou si vous pensez que vous ne pouvez pas vous engager avec les autres pour une raison quelconque, je le respecterai ; mais je vous encouragerais à planter au moins un arbre supportant un fruit, afin que quelqu'un, dans le futur, peut-être un enfant, ait quelque chose à manger. C'est peut-être une autre créature vivante qui pourrait avoir un endroit où se réfugier ou de la nourriture à manger... Il y aura toujours des chan gements sur toute la terre et dans toute l'humanité, les uns incontrôlables, les autres faits à dessein.

peltierJe sais que nous pouvons effectuer un changement pour le meilleur si nous réunissons nos cœurs et nos esprits, et si nous laissons ce jour de deuil être un temps de renouveau ; nous pouvons diffuser le concept que l'humanité doit vivre en harmonie avec les créateurs qui travaillent habilement, et les uns avec les autres. Si ce temps que j'ai passé ici, en prison, ne pouvait rien produire de valeur, je prierais pour qu'il vous pousse à vous engager. Trouvez les bonnes choses à l'intérieur du gouvernement et soutenez-les, et trouvez les mauvaises choses à l'intérieur du gouvernement, et changez-les. Le gouvernement, tel qu'il se présente aujourd'hui, est sur le point de faire perdre aux gens leurs droits constitutionnels. Le go uvernement viole la Constitution tant et plus. Ces violations ont commencé avant vous ou même avant ma conception. Comme certains d'entre vous doivent le savoir, la Constitution est une copie de la loi de la Confédération des Six Nations iroquoises. À l'origine, elle avait été établie de manière à ce que les gens aient un maximum de libertés, en autant qu'ils ne transgressent pas les droits naturels des autres ou, en essence, qu'ils ne fassent pas de mal à autrui. Les libertés et le respect que, selon la loi, nous devrions avoir les uns envers les autres dans cette nation, devraient s'étendre à tous, à l'extérieur de ce royaume ; parce que ce qui est bon pour un homme devrait l'être pour les autres.

Nous devrions permettre aux autres gens de se libérer de la peur. Je me souviens d'un vieux juif que j'avais rencontré autrefois dans une quincaillerie : j'avais engagé la conversation avec lui. Il avait combattu durant la Seconde Guerre mondiale et m'avait dit ces mots que je n'ai jamais oubliés : « Ce n'est pas la nation pour laquelle j'ai toujours combattu, cette nation est devenue une nation de gens qui ont peur de leur gouvernement ; et quand les gens ont peur de leur gouvernement, ils ne sont pas libres ; et j'ai remarqué que ce que les gens feront de mal à autrui, tôt ou tard, si les circonstances changent, ils vous le feront à vous aussi. »

Ces violations des droits humains doivent s'arrêter. Je sais que la tâche doit sembler écrasante et je ne

peltier8peux pas dire que j'ai la réponse pour réussir un changement ; mais ce que je connais, c'est la réponse pour échouer : ne rien faire. Aussi, si mon emprisonnement ne sert à rien d'autre qu'à être la preuve vivante de ces violations, alors qu'il le soit, mais c'est la réalité. Maintenant, cela a été une violation choisie, mais il y a des pouvoirs en action qui cherchent à les infliger à tout un chacun. Cela me rappelle une histoire que j'avais entendue jadis, dans laquelle un homme disait ceci :

« D'abord, ils sont venus pour les communistes, et je n'ai pas parlé - parce que je n'étais pas communiste.
Puis ils sont venus pour les socialistes ; et je n'ai pas parlé - parce que je n'étais pas socialiste.
Puis ils sont venus pour les syndicalistes ; et je n'ai pas parlé - parce que je n'étais pas un syndicaliste.
Puis ils sont venus pour les juifs ; et je n'ai pas parlé parce que je n'étais pas juif.
Puis ils sont venus pour moi - et il n'y avait plus personne pour parler pour moi. » 

Je vous demande de vous rappeler ces choses parce que ce sont des évidences qui sont arrivées et qui arriveront de nouveau, à vous et à vos enfants, et aux enfants de vos enfants, si nous ne nous levons pas. Un célèbre guerrier de la Révolution mexicaine, qui s'appelait Émiliano Zapata 4 , a dit un jour ceci : «Je préfèrerais mourir debout que de vivre à genoux.» Je pourrais poursuivre longtemps ainsi mais je suppose que vous comprenez ce que je veux dire. Je vous encourage à être actif, à vous lever sur votre sol et à recouvrer le sol que nous avons perdu.

peltier11Dieu, si je pouvais être là, avec vous !

Je vais terminer cette lettre pour aujourd'hui. Soyez reconnaissants pour le temps que vous avez, soyez reconnaissants de vous avoir les uns les autres, et serrez-vous dans les bras les uns des autres pour moi.

Je vous verrai quand je vous verrai.
Votre ami
Leonard Peltier

Sites consacrés à Leonard Peltier : http://www. leonard-peltier.com ;
http://www.amnestyusa.org/ (rubriques « Security and Human Rights », Droits sécuritaires et humains) ; voir également les pages Facebook à son nom.

 

 

 

 

Leonard PELTIER commente le décès de Nelson MANDELA

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Publié par Censored News

5 décembre 2013

Traduction Christine Prat

Je vous salue, mes parents, amis et soutiens :

Çà m’attriste d’apprendre qu’un grand homme comme Nelson Mandela a quitté cette vie. C’était un homme qui nous inspirait beaucoup et nous montrait les possibilités pour les Autochtones de mener une lutte continuelle qui pouvait se manifester à des niveaux de liberté entravés par des siècles d’oppression.

Notre peuple Autochtone a souffert des mêmes types d’oppression à de nombreuses reprises. Çà ne se manifeste pas aussi ouvertement et distinctement qu’en d’autres lieus ; cependant, que vous soyez mort parce qu’un policier vous a tiré dessus ou mort parce que vous n’avez pas pu supporter le génocide racial et culturel, vous vous êtes suicidé – vous êtes tout aussi mort dans les deux cas. Nelson Mandela est connu pour avoir conduit la lutte contre l’apartheid en Afrique du Sud. L’Amérique parlait de mettre un terme à l’apartheid et d’appliquer des sanctions à l’Afrique du Sud. N’étant pas tellement adepte de la langue anglaise, je crois comprendre qu’(apartheid) signifie maintenir quelqu’un séparé de quelque chose ; mon peuple a été séparé délibérément des Black Hills sacrées du Dakota du Sud. Il y a eu, et il y a encore, des mesures qui nous maintiennent séparés de notre vraie histoire, appliquées par un système d’éducation qui limite la vérité de notre être. En ce moment même, ici en Amérique, en ce moment même au Canada, en ce moment même en Amérique du Sud, il y a un apartheid qui cherche à nous séparer de nos sites sacrés, de nos terres et de nos ressources. En ce moment même au Canada, des Autochtones luttent pour protéger leurs terres aborigènes de la fracturation hydraulique qui détruit les nappes d’eau et ébranle l’équilibre naturel de la Terre. En ce moment même, avec une mentalité d’apartheid, ils tentent de construire des pipelines, avec un potentiel de destruction écologique considérable, à travers les terres Autochtones. En ce moment même il y a une forme d’apartheid qui cherche à nous séparer de la protection de la constitution des Etats-Unis qui dit que la loi des traités est la loi suprême du pays ; qui dit aussi qu’on a droit à un procès équitable et sans préjugé ; qui dit aussi qu’on a droit à un jury composé de nos pairs. En ce moment même nos jeunes Autochtones adultes sont jugés TROIS fois plus souvent que n’importe quel autre groupe et maintenus en état d’apartheid de leurs familles et d’apartheid d’une représentation légale compétente.

Je pourrais continuer encore et encore, mais vous pouvez voir où je veux en venir. La lutte contre l’apartheid – j’en suis sûr – n’est pas terminée en Afrique du Sud, pas plus que la lutte contre l’apartheid et l’esclavage en Amérique. Nous devons tous considérer Nelson Mandela comme une source d’inspiration, mais je suis aussi inspiré par les plus humbles parmi notre peuple qui résistent pour ce qui est juste, comme le jeune homme ou la jeune femme qui tient pacifiquement une barricade contre les promoteurs et les compagnies pratiquant la fracturation hydraulique ou une quelconque usine qui abime notre air. Pendant que j’y suis, dans tout ce chaos, je veux aussi me souvenir d’un frère du nom de Wanbli Tate qui a défendu infatigablement les droits des Autochtones dans des émissions de radio, des écrits, et sur internet, pour attirer l’attention sur les responsables de méfaits représentés au gouvernement et dans les grandes entreprises.

Nous avons perdu beaucoup d’entre vous ces dernières années et je veux à nouveau me souvenir de mon frère Russell Means qui n’a jamais relâché ses efforts pour mettre un terme à cette version américaine de l’apartheid à laquelle les Autochtones font face.

Dans l’esprit de tous ceux qui sont partis avant nous dans cette lutte, j’aimerais vous dire restez forts et n’abandonnez JAMAIS, JAMAIS.

 

Votre ami pour toujours,
Dans l’esprit de Crazy Horse,

Leonard Peltier

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