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NAITREQUEFEMME
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8 février 2013

Où va la Tunisie ? Ce qu'en disent les tunisiennes.

Tunisie_Chokri_Belaid     Depuis l'assassinat de l'opposant au régime, Chokri Belaïd, le peuple tunisien clame son désaccord avec la politique actuelle menée par Moncef Marzouki.

Dans les rues, hommes et femmes manifestent.

     Les femmes, particulièrement sont inquiètes deTunisie2 leur sort : elles ont "gagné" en émencipation et craignent l'instauration de la charia (port du voile intégral, pertes de leurs droits ...).

     Dans un pays qui a été fondé par une femme, l’image de cette dernière a constamment oscillé entre, d’une part, celle de conseillère secrète tapie dans l’ombre des palais et des harems qui utilise ruse et subterfuges pour infléchir les décisions des hommes et, d’autre part, celle de travailleuse acharnée dans les champs agricoles soumise à la bonne volonté de l’homme, mais gagnant de la prestance, l’âge avançant.

Kahena, guerrière

     Tunisie_KahenaL’histoire garde peu de traces de ces femmes de l’ombre, mais raconte Tunisie_Azizaabondamment les combats des quelques femmes célèbres qui se sont distinguées par leur courage et leur charisme telles la guerrière Kahena, qui a rassemblé derrière elle une armée de plusieurs milliers d’hommes ou encore El Jézia El Hilalia, autre figure mythique de la bravoure féminine antique tunisienne. Plus récemment, des Tunisiennes célèbres ont milité pour l’amélioration des conditions de vie de leurs concitoyens, telle la princesse Aziza Othmana, protectrice des pauvres et des malheureux.                      

                                                                                                      L’émancipation de la femme tunisienne est fortement liée à la promulgation du Code du statut personnel en août 1956, c’est-à-dire seulement cinq mois après l’accession de la Tunisie à l’indépendance.

     Cette consécration législative a été, en bonne partie, inspirée par plusieurs Tunisie_Tahar_Haddadécrits progressistes, œuvres de libéraux et de féministes avant-gardistes, avec à leur tête, Tahar Haddad. Le texte de 1956 abolissait notamment la polygamie et la répudiation et instituait le divorce judiciaire. 

     Tunisie3Au cours du XXe siècle, les femmes tunisiennes, en raison de la pluralité des nationalités présentes sur le territoire national, s’affranchirent progressivement. La lutte pour l’indépendance du pays leur a donné dès les années 1940 une occasion de faire preuve d’un militantisme actif dans lequel toutes les bonnes volontés étaient les bienvenues. Plusieurs femmes de la bourgeoisie tunisoise prirent part activement au mouvement de libération nationale en organisant des collectes au profit des résistants tunisiens, en ouvrant des centres d’accueil pour les enfants, etc.

     Parallèlement à cette contribution à l’indépendance du pays, ces femmes se sont également Tunisie_ELECTIONbattues pour toutes les questions relatives aux droits des Tunisiennes ; des actions illustrées en 1956 par leur revendication en faveur des droits de vote et d’éligibilité féminins et couronnées la même année par la création de l’UNFT, quelques mois, faut-il le préciser, avant la proclamation de la République tunisienne.

Tunisie_Radia_Hadded     Toutefois, comme le rapporte Radhia Haddad, figure historique de ce mouvement, l’élan de ce militantisme féministe actif allait être rapidement refroidi par « la cascade de décisions révolutionnaires qui a concrétisé les rêves les plus utopiques des femmes tunisiennes et les a même prises de court par son rythme et son audace».

     Manœuvre politique – mainmise sur le mouvement féministe – ou volonté de profiter de l’euphorie de l’indépendance pour faire passer en force des droits avant-gardistes pour les Tunisiennes, toujours est-il que d’un grand mouvement national destiné à faire progressivement sortir les femmes tunisiennes des carcans traditionnels, le mouvement féministe tunisien fut alors amené à se concentrer principalement sur des œuvres de sensibilisation, d’éducation, de santé et de charité.

Tunisie1__les_niqabettes_     C’est dans la foulée de cette volonté politique et de ce militantisme féministe de la première heure que la population active féminine, qui représentait selon l’Institut National de la Statistique moins de 19% de la population active en 1975, est passée en 2004 à 24 % sur le plan national approchant même les 30% dans la capitale et les villes côtières. Cette proportion atteint également le tiers lorsqu’on se réfère aux actifs âgés de moins de 30 ans. Cette expansion a concerné tous les domaines. Pour la recherche scientifique, en 2005, on compte 18 femmes chefs de laboratoires, soit un taux de 13 % et 90 chefs d’unités de recherche, soit un taux de 14 %. En outre, le nombre d’études et de recherches entreprises par des femmes est passé de 88 en 1994 à 227 en 2004, soit presque un triplement en 10 ans.

     Mais c’est dans l’enseignement supérieur que l’avancée féminine a été la plus notable, letunisie nombre d’étudiantes dépassant celui des étudiants depuis la rentrée universitaire de 1999-2000, atteignant en 2009-2010 une moyenne de 60% des effectifs.

Habiba Ghribi, athlète

Tunisie_Habiba_Ghribi_athl_te     Dans la société, la femme avait désormais le droit à l’éducation, au travail, au vote et à la gestion de sa vie personnelle et sexuelle.  Avec le Changement du 7 novembre 1987, ces acquis se sont consolidés sous l'impulsion du Président Ben Ali.

     C'est ainsi qu'en 1988, le Pacte national a confirmé le principe d’égalité entre l’homme et la femme et Tunisie_violen 1989, la Tunisie a ratifié la convention des Nations Unies sur l’interdiction de toute discrimination à l’égard des femmes.

     En 1993, le principe de la coresponsabilité familiale du couple est institué. En outre, la création, d’abord en 1990 du Centre de recherches, d’études, de documentation et d’information sur la femme (CREDIF) doté, depuis fin 1993, d’un observatoire de la condition de la femme, puis en 1992 du ministère des Affaires de la Femme et de la Famille a permis à la Tunisie de disposer de structures consacrées à la femme et de moyens pour assurer sa participation en tant qu’élément actif de la société.

     Enfin, le Code du travail, depuis 1992, date à laquelle il a fait l’objet d’un amendement, affirme le principe de non-discrimination entre l’homme et la femme dans tous les aspects du travail (accès à l’emploi, égalité de salaire), aussi bien pour le secteur public que pour le secteur privé.

     Voilées ou non, les femmes tunisiennes semblent toujours aussi ambitieuses et audacieuses, prêtes à continuer leur conquête d’un plus grand pouvoir de décision dans les entreprises et la société.

Tunisie_Souhayr_Belhassen     En Tunisie, la première génération de femmes décideurs prend sa retraite dans les années en cours. Elle a tracé la voie et montré que le plafond de verre pouvait être percé en s’imposant dans un monde d’hommes.

Elles passent la main, en espérant que celles qui les suivront sauront préserver les acquis et consolider l’image de sérieux, de rigueur et de compétence des femmes tunisiennes.

 

Souhayr Belhassen, Présidente de la Ligue des Droits de l'Homme tunisienne

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